Vous, qui ne voyez que de l’eau,

Lorsque vous regardez mes flots,

 

Sachez que jadis,

J’étais divine.

De la naissance au trépas,

Les Hommes se confiaient à moi.

Je les portais comme une mère,

Emportant leurs prières

Jusqu’à la mer,

Où elles devenaient lumières,

Au soleil couchant.

 

Et puis

Dieu est venu.

De la naissance au trépas,

Les Hommes n’écoutèrent que ses lois.

Ils enfermèrent leurs prières

Dans des églises de pierre.

Moi je redevins rivière,

Filant vers la mer,

Et le soleil couchant.

 

Pourtant,

Lorsque vous regardez bien,

Êtes-vous si certains,

Que ce n’est que de l’eau

Qui roule dans mes flots ?

 

Qu’advient-il des prières

Qui ne se prononcent pas

Dans les églises de pierre ?

 

Car il est des enfants

Qui ne naitront pas,

Et dont Dieu ne veut pas.

 

Car il est des amours

Qui ne se bénissent pas,

Et dont Dieu ne veut pas.

 

Car il est des morts

Qui ne croyaient pas,

Et dont Dieu ne veut pas.

 

Puisqu’il ne leur reste que moi

Je les prends dans mes bras

Je les porte comme une mère

Jusqu’à la mer

Pour qu’ils devinent lumières

Au soleil couchant